#93 – Contourner ses lacunes en dessin et percer dans l’illustration

Il y a quelques jours, j’ai effectué un sondage auprès des membres de ma communauté pour leur demander quel était leur plus gros blocage concernant l’illustration. C’est quelque chose que je fais souvent pour rester proche des préoccupations et des besoins de mon audience, et l’une des choses qui est beaucoup ressorti, c’est le manque de confiance dans son niveau de dessin : si vous connaissez mon parcours, vous savez que c’est quelque chose qui résonne beaucoup en moi car mes lacunes en dessin ont failli m’empêcher de me lancer dans l’illustration !

Mais une chose dont j’ai pris conscience avec le temps, c’est que le dessin s’apprend toute la vie, et qu’au delà du niveau technique, notre sensibilité et notre approche unique apporte une plus-value dans tout ce qu’on crée. Et aujourd’hui, nous avons des outils à notre disposition pour nous faciliter la vie auxquels beaucoup d’illustrateur·trice·s ont recours alors pourquoi nous en priver ?

Écoutez l’épisode pour découvrir :

• Comment compenser vos lacunes
• Comment trouver votre point fort (même si vous débutez dans le dessin)
• Comment vous améliorez rapidement

Et plein d’autres choses !

✨LIENS MENTIONNÉS DANS CET ÉPISODE :

Post Norman Rockwell
Article “préparer ses fichiers”

Est-ce qu’aujourd’hui tu t’interdis d’envisager l’illustration comme une option de carrière à cause de tes supposées lacunes en dessin ? Si oui, sache que 99% des illustrateur·trice·s qui se sont lancés dans l’illustration avaient les mêmes peurs que toi. Et je m’inclus dedans. En effet, lorsque j’étais plus jeune, je rêvais de faire du dessin animé. Mais à l’école, j’étais déprimée par le niveau des autres, ce qui m’a fait arrêter de dessiner, pensant ne pas avoir le niveau suffisant. J’étais obsédée par mes lacunes en dessin : je ne savais pas bien dessiner les cheveux, les paysages, etc. Cette obsession m’a fait arrêter de dessiner pendant trois ans.

Cependant, après cette pause, j’ai appris à dessiner les cheveux d’une façon particulière qui m’a permis de gagner en notoriété rapidement. J’ai fait de cette lacune un atout. Les paysages, en revanche, bien que je les adore, ne sont toujours pas mon fort. Je m’ennuie à les dessiner, même si j’adore les regarder.

Il est crucial de ne pas passer à côté de ta passion. Si tu rêves de ne plus avoir de boss et d’avoir une activité plus flexible, l’illustration pourrait être la voie pour toi. Voici quelques conseils pour t’aider à surmonter tes peurs et à développer ton talent.

1. Utiliser la Photo

Oh le gros tabou ! Oui, beaucoup d’illustrateur·trice·s utilisent la photo comme référence. Utiliser la photo de manière éthique est crucial : ne copie-colle pas la photo, mélange plusieurs sources ou utilise tes propres photos. Réfléchis avant à ta composition et à ce que tu veux exprimer avant de faire tes recherches. Cherche des photos qui vont dans ce sens-là.

Par exemple, Norman Rockwell, illustrateur né à la fin du 19ème siècle, utilisait des photos pour ses illustrations. Il demandait à des gens dans la rue de poser pour lui et il utilisait un système pour décalquer qui s’apparente à notre table lumineuse. L’illustration doit transmettre un message. La technique est un vecteur, mais tout ce qui peut te faire gagner du temps est bon à prendre. Souffrir pour être illustrateur·trice n’est pas nécessaire ; la qualité et l’authenticité de ton travail sont plus importantes que le temps ou les sacrifices faits. Tu peux prendre des cours de dessin technique si cela te fait plaisir, mais trouve ce qui te plaît vraiment. Si tu préfères utiliser la photo ou l’IA comme outil, fais-le, mais utilise-les comme des outils et non comme une fin en soi.

Nous devons déconstruire cette mentalité qui valorise un travail incessant et douloureux pour atteindre un but inatteignable. On peut devenir illustrateur·trice et en vivre sans avoir un niveau de dessin parfait. Je suis la preuve vivante de cela. De 2010 à 2020, je vivais de mon métier d’illustratrice commerciale.

Arrêtons de culpabiliser. Les outils qui nous font gagner du temps et maintiennent la qualité de notre travail sont essentiels. De nombreux grands artistes ont utilisé des techniques similaires pour améliorer leur précision et leur efficacité. Utilise les outils à ta disposition de manière raisonnable et respectueuse, continue à dessiner et à t’améliorer.

2. Travailler sur des Petits Formats

Auparavant, je dessinais sur des formats A3, ce qui était hyper chronophage et ennuyeux. Les petits formats permettent de progresser plus rapidement et de maintenir la motivation intacte. Il est important de terminer ses essais pour pouvoir “archiver” et tirer les leçons de nos essais pour s’améliorer la fois d’après. Les petits formats aident à cela. Ils permettent aussi de s’approprier une technique, une combinaison de couleurs ou de techniques plus rapidement.

3. Styliser et Compenser

Généralement, les lacunes en dessin se manifestent dans les personnages et l’architecture. Les personnages sont difficiles à dessiner parce qu’on connaît tellement les visages et les corps humains qu’au moindre détail raté, on le remarque. Si tu as des lacunes pour dessiner des personnages, visages, ou architectures, ne fais pas du dessin trop réaliste. Stylise ton art. Entraîne-toi à dessiner des visages avec quelques traits seulement et diverses expressions. Ensuite, applique ce style à l’architecture. Le but est qu’avec ton style, tu puisses tout dessiner. C’est le principe de l’illustration.

Si ta technique de dessin n’est pas parfaite, concentre-toi sur la qualité de tes scans. Si tu utilises des techniques traditionnelles pour illustrer (crayons, peinture, etc.), assure-toi que tes scans soient de haute définition. Cela permettra de compenser certaines lacunes techniques.

4. Trouver ton Point Fort

Pour créer une illustration forte, il n’y a pas que la technique du dessin qui compte. Les couleurs, les textures, la composition et le conceptuel jouent un rôle crucial. Par exemple, Beya Rebaï utilise des couleurs vibrantes qui rappellent l’impressionnisme avec des personnages très simples. Cecilia Carlstedt utilise des collages, des aquarelles et des coups de pinceau pour ajouter beaucoup de personnalité à ses œuvres. Malika Favre, quant à elle, manie la composition de manière exceptionnelle, créant des illustrations vectorielles riches avec des niveaux de lecture multiples. Laura Lhuillier crée un univers vibrant d’animaux et de végétation stylisés.

Ne vois pas tes illustrations comme de simples dessins, mais comme des œuvres d’art à travers lesquelles tu tentes de faire passer un message. Utilise la couleur, ta technique, les textures et la composition pour transmettre des émotions et des messages variés.

Mon conseil pour prendre du plaisir et progresser rapidement est de trouver ta technique de prédilection (peinture, gouache, crayons de couleur), ton processus de travail, et tu prendras beaucoup plus de plaisir à créer. Ainsi, tu feras des progrès sans t’en rendre compte.

Personnellement, je n’ai jamais aimé le dessin académique, les cours de nu, etc. Pour moi, la partie préférée est lorsque j’ai fini mon dessin, que je le scanne, que je scanne toutes les textures créées à côté, et que je vois l’illustration naître sous mes yeux. C’est le moment où j’affine les couleurs, j’accentue des contrastes, des textures ici et là pour transposer ma vision. Souvent, cela prend une direction que je n’avais pas forcément choisie, car la magie opère et il se passe quelque chose qui n’est plus de notre ressort.

5. Se Spécialiser dans une Niche

Le principe d’une niche est de se spécialiser dans un domaine particulier : food, botanique, ce sont des sujets plus organiques qui peuvent s’offrir le luxe d’être imparfaits. Choisis une niche dans laquelle tu es plus à l’aise. Par exemple, Florence Gendre ne dessine pas de personnages. Cependant, je recommande d’en avoir dans ton portfolio, car les personnages sont très vendeurs. Utilise la stylisation pour créer quelques illustrations avec des personnages, tout en te concentrant sur ce que tu préfères dessiner. Trouve ton petit truc pour te démarquer de la concurrence.

Pour choisir ta niche, voici quelques conseils :

1. N’en fais pas une obsession. Une niche doit venir naturellement à toi. Ne te force pas à choisir une niche. À force de dessiner, elle viendra à toi naturellement.
2. Fais de la rétro-ingénierie. Enregistre toutes les illustrations qui te plaisent et essaie de trouver des points communs pour faire ressortir ce qui te touche le plus.
3. Combine tes intérêts. Si tu es intéressé·e par plusieurs sujets, envisage de les mélanger.
4. Réfléchis à ton message. Pense au message ou à l’émotion que tu souhaites transmettre à travers ton art. Certains sujets peuvent mieux communiquer ce que tu veux exprimer.
5. Prends en compte ton public. Réfléchis à ce que ton public apprécie et comment cela peut influencer ton choix de sujet. Cependant, reste fidèle à ce qui te passionne et te motive en tant qu’artiste.
6. Suis ton instinct. Parfois, il est important de suivre ton instinct artistique. Si tu ressens le besoin de peindre quelque chose de différent, laisse-toi guider par cette impulsion. Cela peut mener à des découvertes inattendues et enrichissantes.

N’oublie pas qu’il y a de la place pour tout le monde. Partager tes connaissances ne te fera pas de l’ombre, mais contribuera à faire de toi un·e meilleur·e humain·e et à apporter plus de beauté dans ce monde. Partage cet article avec un·e ami·e, cela m’aide beaucoup, cela aide le podcast et la communauté.

Conclusion

Devenir illustrateur·trice est un parcours personnel et unique. Chaque artiste a ses propres forces et faiblesses. L’important est de ne pas se laisser paralyser par ses lacunes. Utilise des outils comme la photo pour te guider, travaille sur des petits formats pour progresser rapidement, stylise et compense tes faiblesses, trouve ton point fort et spécialise-toi dans une niche qui te passionne. En suivant ces conseils, tu pourras non seulement améliorer tes compétences, mais aussi trouver un immense plaisir à créer et à partager ton art avec le monde. Souviens-toi, l’illustration est plus qu’une simple technique ; c’est une façon d’exprimer tes émotions, tes idées et ta vision unique du monde.

N’oublie pas que, quelle que soit ta niche ou ton style, il y a toujours une place pour toi dans le monde de l’illustration. En cultivant ta passion et en surmontant tes peurs, tu pourras non seulement réussir en tant qu’illustrateur·trice, mais aussi inspirer d’autres à suivre leur propre voie créative. Continue de dessiner, d’expérimenter et de partager ton travail avec le monde. L’art est un voyage sans fin, et chaque étape te rapproche un peu plus de ta véritable expression artistique.