Bonjour, je m’appelle Ëlodie, et je suis illustrateur·ice. Récemment, j’ai pris conscience de l’ampleur d’une situation de taille dans le monde des illustrateurs et des artistes en général : c’est l’envie et le besoin de connexion réelle et physique avec les gens avec qui on collabore, notamment nos clients. Je pense que cette envie provient du fait qu’on se sent souvent seul·e quand on est artiste, et si c’est votre cas, je vous renvoie à l’épisode 54 dans lequel j’évoque justement ce sujet. Rencontrer ses clients en physique, pouvoir échanger de visu, avoir un vrai contact humain, en somme, c’est toujours très précieux.
Cependant, aujourd’hui, j’ai envie d’aborder un sujet un peu controversé : travailler uniquement avec des clients locaux. Personnellement, j’ai commencé de cette manière, et je pense que c’est le cas de beaucoup d’artistes. Mais aujourd’hui, si votre objectif est d’être libre financièrement à 100% grâce à votre art, je vais vous donner cinq raisons pour lesquelles travailler uniquement avec des clients locaux peut poser problème.
Je comprends l’envie de créer du lien, de travailler avec des personnes de sa région, etc., mais en tant qu’illustrateur·ice, je pense que c’est un luxe qu’on ne peut pas se permettre. Et même si vous souhaitez garder votre activité comme un side-projet car vous vous sentez épanoui·e dans votre job actuel, restez avec moi car je pense que ce sujet vous concerne également.
Dans cet épisode, nous allons aborder les points suivants :
Comment trouver de belles opportunités dans un marché saturé ?
En quoi la façon dont vous cherchez vos clients peut avoir un impact sur votre santé mentale.
La meilleure chose à faire pour atteindre ses objectifs (c’est-à-dire voir loin et grand).
Raison #1 : Manque d’opportunité
Cette raison arrive naturellement en N°1 car c’est une évidence, mais chercher à travailler uniquement avec les clients qui se trouvent dans un arc de cercle limité, c’est se priver de très belles opportunités qui pourraient potentiellement vous correspondre beaucoup mieux !
Même si j’ai tendance à penser que tout le monde a sa place dans le milieu de l’illustration, je pense que c’est surtout vrai quand on pense de façon nationale ou internationale, car un marché local est bien souvent vite saturé.
N’oubliez pas que vous pouvez travailler de n’importe où dans le monde et avec n’importe qui. Ce qui signifie que même si vous vivez au milieu d’un trou paumé, du moment que vous avez une bonne connexion internet et un scanner pour numériser vos créations originales, vous aurez de quoi acheter votre matériel et surtout collaborer avec des gens du monde entier !
Aujourd’hui, les plateformes en ligne, telles que les sites web et les réseaux sociaux, vous permettent de toucher le monde entier. Donc, je vous encourage d’ailleurs à écrire en anglais sur vos posts (une simple phrase en anglais suffira, car votre travail parle de lui-même).
Raison #2 : Clients mal éduqués et mal habitués
Tous les jours, ou presque, je reçois des mails d’illustrateurs qui ont lu mes conseils concernant les devis et qui tentent de les appliquer, mais qui se retrouvent face à un mur avec des clients qui ont toujours l’air de tomber des nues lorsqu’ils sont confrontés aux vrais prix du marché et lorsqu’on leur explique que non, ils ne pourront pas faire ce qu’ils veulent avec nos illustrations ! L’utilisation d’une illustration, c’est toujours quelque chose de “cadré,” je le rappelle ici pour ceux et celles qui découvrent ce podcast, et je dirais même que c’est le conseil le plus important que je pourrais vous donner, c’est pour ça que j’ai tendance à le marteler.
Malheureusement, contrairement aux clients qui ont l’habitude de travailler avec des illustrateurs, bien souvent les clients locaux sont soit tout à fait novices et n’ont pas forcément conscience des prix du marché, soit ils ont déjà travaillé avec des illustrateurs qui les ont “mal” habitués en pratiquant des tarifs ridicules. D’ailleurs, j’en profite pour vous dire que ce genre de pratique fait beaucoup de mal à notre profession !
Donc souvent on se retrouve face à des clients qui peuvent être totalement fermés à la discussion, ce qui peut être hyper frustrant et dévalorisant également.
Raison #3 : Perte de temps
À éduquer les clients pour rien car ce n’est pas votre client idéal, à faire des devis pour rien.
Même si j’encourage souvent la communication avec ses clients, parfois face à des clients hermétiques, je pense que la communication est inutile, voire stérile. Parfois il faut accepter que certains clients ne sont pas notre clientèle idéale. Si un client refuse vos conditions sans sourciller, ce n’est pas votre client idéal. Ce n’est pas un client qui va vous permettre d’atteindre votre rêve de liberté financière ! Passez votre chemin sans regret, sinon, vous serez encore plus mal après.
Mais j’ai envie de vous dire que peut-être que vos clients de rêve se trouvent en Angleterre, aux États-Unis, ou ailleurs ! La France n’est pas le pays qui utilise le plus d’illustrations dans sa communication, même si c’est en train de changer et ça fait plaisir ! Mais vous restreindre uniquement à votre région, ville, ou village, c’est vraiment ne pas vous donner toutes les chances d’y arriver !
N’abandonnez pas avant d’avoir tenté de prospecter des clients d’envergure nationale ou internationale ! Peut-être qu’aujourd’hui, votre manque de confiance en vous vous empêche de voir grand, mais je vous donne un conseil : il faut toujours essayer de voir plus grand que ce qu’on veut vraiment atteindre. La fameuse phrase d’Oscar Wilde s’applique ici : “Il faut toujours viser la lune, car même en cas d’échec, on atterrit dans les étoiles.”
Ça, c’est un conseil très important : essayez toujours de voir plus loin que là où vous en êtes actuellement. Je sais que souvent on peut avoir la tête dans le guidon, et plein de choses qui nous embrument l’esprit
et nous empêchent de voir plus loin que le bout de notre nez, mais c’est important de penser à l’avenir, surtout si votre rêve est d’être illustrateur·ice à plein temps.
Raison #4 : Dévalorisation de vous-même
La santé mentale d’un artiste, c’est primordial pour avancer ! Et en tant qu’artiste, un des ingrédients essentiels pour fonctionner, c’est la reconnaissance : celle de nos pairs, mais surtout celle de nos clients, et cela passe par le fait d’être considéré·e et rémunéré·e pour notre travail.
Personnellement, je me souviens très bien comment je me sentais mal et nulle, voire inutile, quand j’ai débarqué à Paris en 2010 avec mon portfolio tout neuf sous le bras. À mes débuts, j’étais obsédé·e par l’idée de percer, j’essayais vraiment toutes les techniques possibles et imaginables pour gagner en visibilité. Et même si je considère avoir eu de la chance car j’ai fini par trouver mon public et travailler sur de supers projets pour des magazines de mode, des marques de luxe, de l’édition, etc., le temps que ça se décante m’a paru durer une éternité !
Une phase durant laquelle je me sentais “infantilisé·e,” car je voyais bien dans le regard des gens que je n’étais pas “crédible,” que je faisais “mumuse” avec mes crayons. Aujourd’hui, alors que je considère n’avoir rien à prouver en quelque sorte, les gens que je rencontre sont toujours hyper étonnés de voir que j’arrive à en vivre.
Bref, le chemin est encore long pour légitimer nos métiers d’artiste, et celui d’illustrateur en particulier. Ce que j’avais envie de vous dire, c’est que ma confiance en moi a fait un bond incroyable à partir du moment où j’ai eu mes premiers clients pros. Au début, c’était juste une illustration pour un flyer de soirée, puis une illustration pour un magazine, et ensuite les opportunités sont devenues plus “ambitieuses.” Même si le syndrome de l’imposteur ne s’efface jamais, j’ai pu être mieux armé·e à ce moment-là face au regard des gens, car je savais que je traçais ma route.
Personnellement, j’ai l’impression d’avoir essuyé beaucoup d’échecs avant d’avoir réussi à me sentir légitime. Mais je ne sais pas combien de temps j’aurais pu tenir si “la reconnaissance” n’avait pas fini par pointer son nez. Pour moi, cette reconnaissance passe par le fait d’avoir des clients qui me rémunèrent correctement pour que je puisse vivre de mon art.
Raison #5 : L’abandon de ses rêves pour échec financier
Depuis 5 ans maintenant que j’accompagne les artistes et que je suis attentive à leurs questionnements et à leurs doutes, je vois beaucoup de personnes abandonner l’idée de vivre de leur art après avoir tenté l’expérience sans succès. Le problème, c’est que bien souvent, les personnes qui abandonnent n’ont jamais osé contacter des marques, des magazines, ou encore des agences de communication pour leur proposer leurs services.
Alors je comprends que ce soit difficile de se sentir légitime à contacter des clients pros, qu’on ait peur de se griller, ou tout simplement de se prendre un vent, mais vous ne saurez jamais ce que vous loupez si vous ne tentez pas l’aventure.
Et quelque chose que j’ai envie de vous dire par rapport à cela : c’est que l’échec quand on prospecte est inévitable. Certains vous contacteront pour vous dire non, d’autres ne vous répondront jamais, mais parmi eux se trouvent peut-être une super opportunité. Parfois il n’en faut pas plus pour vous mettre le pied à l’étrier, gagner cette confiance qui vous fera comprendre que c’est possible, et éventuellement travailler sur un projet qui vous permettra de rendre votre travail visible auprès d’autres clients potentiels.
Et quelque chose que j’ai envie de vous dire par rapport à l’échec : quelles que soient votre sensibilité, votre vulnérabilité, votre peur immense de décevoir les autres ou pire, vous-mêmes, on s’habitue. Pour en avoir parlé avec d’autres artistes, ils avaient le même ressenti. À force, on se blinde, et surtout on comprend que ça n’a rien de personnel, c’est le business. Peut-être que notre travail n’est pas assez bon, et dans ce cas-là, à nous de combler nos lacunes, peut-être que notre style n’est pas dans l’air du temps, et dans ce cas-là, on a la possibilité de pivoter. Mais dans tous les cas, on a le pouvoir de revenir à la planche à dessin pour faire en sorte que notre rêve devienne réalité.
Conclusion
Vous pouvez commencer par des clients locaux pour vous faire la main, mais passez vite à la prospection en ligne. Vous verrez que les clients prêts à mettre la main au portefeuille existent, seulement il faut leur dire que vous existez et il faut aller les chercher. Ne laissez pas le fait de ne pas savoir comment numériser vos créations être un obstacle sur votre route. Pas plus d’un an de projets locaux (ou 15-20 projets) et ensuite vous pourrez commencer à viser des clients plus pros.
J’espère que cet épisode vous aidera à voir les avantages de ne pas vous limiter à des clients locaux. Travailler avec des clients du monde entier peut ouvrir des portes insoupçonnées pour votre carrière d’illustrateur·ice. Ne laissez pas la peur de l’inconnu vous empêcher de réaliser votre rêve. Alors, à vous de jouer, visez la lune, car même en cas d’échec, vous atterrirez parmi les étoiles.
The Comments
roxane Lavoie
Merci pour ton podcast! Toujours très encourageant!
J’aimerais savoir comment se faire payer par exemple, par un russe… 🙂
Comment fonctionne tout ça. Il paie avant? J’imagine qu’il y a plusieurs étapes…
Merci!
Ëlodie
> roxane LavoieBonjour Roxane ! Tu peux te faire payer tout simplement par virement et oui je recommande de toujours demander un acompte de la moitié de la somme avant même de commencer à travailler :).