
Le pouvoir de dire non (sans culpabiliser)
Quand on est illustrateur·trice, on reçoit régulièrement des demandes de travail gratuit… surtout de la part de personnes qu’on connaît : famille, amis, voisin·es ou connaissances : « Tu pourrais me faire un petit dessin ? », « C’est juste pour un cadeau… », « Allez, ça te prend deux secondes ! ».
Et dans ces moments-là, c’est difficile de savoir quoi répondre. On veut faire plaisir, on a peur de froisser, on ne veut pas passer pour quelqu’un de prétentieux, mais au fond, on sent que quelque chose ne sonne pas juste.
Cette semaine, je vous propose un épisode pour vous ’aider à y voir plus clair et surtout à poser un cadre respectueux autour de votre métier sans tomber dans la culpabilité ni dans la justification.
Attention, je ne crois pas que les gens soient des profiteurs par nature. Et je ne pense pas qu’il faille refuser systématiquement de donner. En revanche, je pense qu’on a besoin d’être au clair sur ce qui est un choix, et ce qui est une pression déguisée.
Si vous aussi vous vous sentez parfois mal à l’aise face à ces demandes, que vous ne savez pas dire non ou que vous voulez le faire avec plus de sérénité, cet épisode devrait vous y aider.
✨ Écoutez l’épisode pour découvrir :
- Pourquoi dire non, c’est aussi se respecter (et respecter son métier)
- Comment poser un cadre clair et bienveillant face à votre entourage
- Dans quelles situations offrir une création gratuitement peut avoir du sens
Et surtout, comment faire la paix avec cette idée : vous pouvez être généreu·x·se ET poser vos limites.
- mon compte Instagram secondaire : @elodie.learn
- Cette scène hilarante de Ghost (oh ça va hein ! On a les références pop culture de son âge ^^)
Transcription générée automatiquement (elle peut être incomplète par rapport à l’épisode).
Le pouvoir de dire non (sans culpabiliser)
Il existe une histoire célèbre autour de Pablo Picasso qui illustre à merveille la problématique que rencontrent de nombreux·ses artistes : celle de la reconnaissance du travail créatif. Un jour, dans un café, un homme lui demande un croquis rapide sur une serviette. Picasso s’exécute, puis demande 10 000 francs. L’homme, surpris, s’exclame : « Comment ? Il ne vous a fallu qu’une minute pour le faire ! » Ce à quoi Picasso répond : « Non, monsieur. Il m’a fallu toute une vie. »
Cette anecdote raconte une vérité difficilement perceptible pour beaucoup : ce que l’on paie, ce n’est pas uniquement le temps d’exécution, mais les années d’apprentissage, les doutes, les choix, les échecs, les remises en question, et la réflexion profonde derrière chaque création. Pourtant, dans nos métiers créatifs, ce travail invisible est souvent oublié, effacé derrière une apparente facilité ou “fluidité” du geste final.
L’illusion de la facilité
Nombreux·ses sont celles et ceux qui pensent que créer, pour nous, c’est “rapide” ou “naturel”. Ils ne voient pas l’effort derrière, ni l’investissement personnel. Cela ne vient pas forcément d’une mauvaise intention, mais d’un héritage culturel où créativité rime trop souvent avec gratuité. Ce regard biaisé est d’autant plus présent lorsqu’on est une femme. Dans de nombreux environnements, il existe une injonction implicite à donner, à être disponible, à faire preuve de générosité sans attendre de retour.
Quand on est une femme créative, on cumule les angles morts. On attend de nous une disponibilité constante, sans prendre en compte notre temps, notre expertise, ni notre besoin fondamental de reconnaissance. Ce contexte culturel rend encore plus difficile le fait de dire non au travail gratuit.
La gêne de dire non
On a tous·tes vécu ce moment : un·e proche, une copine, un cousin, un parent, nous demande un “petit dessin” pour un anniversaire ou une occasion spéciale. Rien de méchant, juste “un truc vite fait”. Et là, on se fige. Parce qu’on est partagé·e entre la peur de froisser, l’envie d’aider, et la conscience qu’on n’en a ni le temps ni l’énergie. On culpabilise. Et pourtant, on aimerait juste pouvoir dire non, simplement.
Aujourd’hui, j’aimerais justement parler de ça. Non pas pour dire qu’il faut toujours dire non, ni pour affirmer qu’il faut facturer chaque croquis. Mais pour vous aider à poser un cadre personnel, qui vous protège, vous respecte, et vous permette aussi – quand vous le souhaitez – d’être généreux·se à votre manière. Dire non au travail gratuit, ce n’est pas être égoïste : c’est poser une limite saine.
Une frontière floue entre affectif et professionnel
Ce que je veux aborder ici, c’est cette frontière difficile à tracer entre le travail et l’affectif. Quand quelqu’un qu’on aime bien nous demande une création gratuite – logo, illustration, portrait – on se retrouve entre deux élans : celui d’aider et celui de préserver notre énergie. Et dans ce tiraillement, beaucoup finissent par dire oui, alors qu’au fond, ils pensent non.
Je ne pense pas que les gens soient des profiteurs. Et je ne dis pas non plus qu’il faut systématiquement monétiser chaque création. Mais pour pouvoir choisir librement, il faut d’abord être au clair avec soi-même. Il faut avoir conscience de ses limites, de sa valeur, pour ne pas s’épuiser dans une suite infinie de “oui” qui nous vident au lieu de nous nourrir. Dire non au travail gratuit, c’est aussi une manière de se respecter.
Apprendre à valoriser son temps
Personnellement, j’ai mis du temps à comprendre ça. Aujourd’hui, je n’ai aucun mal à refuser une demande non rémunérée. Mais au début, c’était très difficile. Je recevais des messages du type : « Je sais que t’es débordée mais… » Ce n’est pas de la mauvaise volonté. Ce sont des gens qui nous aiment, qui aiment notre travail, mais qui ne réalisent pas ce que cela implique, en termes de charge mentale, d’énergie et de temps.
Dans mes podcasts, j’ai déjà partagé mes réflexions sur le sujet, et certains retours étaient critiques. Refuser de travailler gratuitement pour un client en a choqué quelques-un·es. Pourtant, c’est aussi notre rôle, en tant qu’artistes, d’éduquer. D’éduquer les clients à la valeur de notre travail, mais aussi d’éduquer les artistes eux-mêmes. Dire non au travail gratuit, c’est aussi transmettre une culture du respect.
Cela ne signifie pas qu’on ne peut jamais donner. J’ai des cartons remplis de dessins que je ne vendrai jamais. Parfois, j’ai envie d’en offrir. Parce que je n’y tiens pas spécialement, ou parce que j’ai envie de faire plaisir. Mais je ne le fais pas sur demande. Et surtout, jamais sous pression. La gratuité n’est pas le problème. Le problème, c’est de donner par obligation. C’est cela qui use la créativité, à long terme.
Comment poser un cadre clair ?
Quand on est freelance, tout repose sur nous. Notre énergie, notre concentration, notre emploi du temps. Poser un cadre n’est pas un luxe : c’est une nécessité.
Ton travail a de la valeur (et toi aussi)
On peut avoir envie de faire plaisir, mais il faut toujours se rappeler que notre travail n’est pas “rien”. Même si on aime ce qu’on fait, notre temps, notre expertise, notre énergie méritent d’être respectés. Dire non au travail gratuit, c’est reconnaître cette valeur.
Quand on dit “oui” à une demande qu’on ne peut pas assumer, on dit “non” à autre chose. Parfois, c’est à un projet personnel. Parfois, c’est à du repos. Dans mon cas, j’ai cette idée lointaine d’écrire un livre. Ce n’est pas une priorité, mais c’est une envie enfouie. Récemment, une maison d’édition m’a invitée à discuter d’un projet, et ça m’a fait rêver. Mais quand j’en ai parlé à Loëtitia, mon assistante, elle m’a rappelée qu’objectivement, je n’ai pas la place pour ça dans mon emploi du temps. Et elle avait raison.
Offrir un dessin, ce n’est pas un problème. Mais cela doit venir de vous, pas d’une pression extérieure. Sinon, ce n’est plus un cadeau, c’est un compromis.
Offrir, oui… mais à vos conditions
Posez-vous ces deux questions simples :
Dans quelles situations travailler gratuitement ne nuit pas à mon activité ?
Dans quelles situations suis-je vraiment ok pour donner ?
Il y a des cas où je déconseille fortement de donner :
Les entreprises, sans exception. Elles retirent de la valeur de votre travail, que ce soit en communication ou en visibilité. Cette valeur mérite une rémunération. Dire non au travail gratuit ici, c’est protéger notre secteur.
Les associations dont les valeurs ne vous parlent pas, ou qui ne respectent pas votre travail sous prétexte de “bonne cause”.
Offrir peut être un beau geste, mais seulement si cela vient du cœur. J’ai moi-même offert des aquarelles à mes parents quand j’étais adolescente, inspirées de cartes postales d’artistes d’Oléron. C’était sincère, spontané. Mais ce que vous offrez doit toujours venir de vous. Pas d’une pression, ni d’une culpabilité.
Ton cadre, tes règles
C’est à vous de définir vos règles. Ce que vous acceptez, refusez, ou tolérez à l’occasion. Vous pouvez décider :
d’offrir une création par an à un·e proche
de pratiquer un tarif symbolique dans certains cas
de troquer contre un dîner, un service, ou un prix libre – mais uniquement à votre initiative
de refuser toutes les demandes spontanées
Une règle simple peut vous guider : si cela ne vous procure pas de la joie, ce n’est pas un vrai cadeau. Dire non au travail gratuit devient alors un acte de cohérence.
Préparez-vous aussi une phrase type à ressortir sans culpabilité :
« Je ne prends plus ce genre de demandes, même pour mes proches. J’ai besoin de préserver mon temps pour mes projets en cours. »
Cela permet de poser une limite claire, sans accusation, tout en rappelant que créer prend du temps, même si c’est “un petit dessin”.
Anticiper les réactions
Certaines personnes seront déçues. D’autres comprendront. Quelques-unes vous trouveront trop rigide. Et c’est ok. Dire non au travail gratuit, c’est poser une limite saine. Quand on a tendance à vouloir plaire, on dit souvent “oui” pour éviter le conflit. Mais paradoxalement, c’est en disant non qu’on se fait respecter. Les enfants, les animaux, eux, acceptent très bien les “non”. Ce n’est pas cruel. C’est clair.
Vous avez le droit de penser à vous. Et de protéger ce qui vous permet de continuer à créer avec justesse et intégrité.
Conclusion
Votre travail n’est pas un “petit service”. Il est le fruit d’années de pratique, d’essais, d’émotions, de doutes. C’est une part de vous, mais c’est aussi un métier. Dans un monde où les artistes sont souvent mal considérés, chaque fois que vous dites non, vous dites oui à une forme de respect.
Dire non au travail gratuit, c’est vous affirmer. C’est choisir de ne pas brader votre temps. C’est éduquer, sensibiliser, expliquer que ce qui semble facile a en réalité demandé des années de construction. Dire non au travail gratuit, ce n’est pas rejeter les autres. C’est se choisir. Dire non au travail gratuit, ce n’est pas rompre un lien, c’est poser une limite saine. Dire non au travail gratuit, c’est préserver votre élan créatif. Dire non au travail gratuit, c’est faire un choix conscient. Dire non au travail gratuit, c’est être juste. Dire non au travail gratuit, c’est se respecter. Dire non au travail gratuit, c’est aussi respecter les autres en clarifiant vos limites. Dire non au travail gratuit, c’est une manière de dire oui : oui à vos projets, à votre équilibre, à votre vocation. Dire non au travail gratuit, c’est dire oui à ce que vous êtes.
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Au top!
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Merci pour ce podcast et ses conseils au top ! Ça me fait du bien d’entendre aussi tant de positivité, ça me rebooste et me donne du courage 🤗 Je rêve de devenir illustratrice depuis longtemps alors écouter ce podcast est incontournable !
— OuiTG