Aujourd’hui c’est mon anniversaire mais également celui de mon entreprise, et pour l’occasion j’ai eu envie d’écrire un article un peu spécial en forme de rétrospective. Je reviens donc sur mes premiers pas dans l’illustration, mes débuts difficiles, mes périodes de doutes, et je vous raconte mon cheminement en tant qu’illustratrice de 2005 à aujourd’hui.
Quelque soit votre situation, j’espère que cet article vous encouragera à poursuivre votre rêve. Le monde a besoin de votre talent ne l’oubliez pas. 😉
1 | Ma vie avant de me lancer dans l’illustration
2005 : Après ma sortie de l’école, mon diplôme d’infographiste 2D-3D en poche, je suis un peu perdue. L’idée de travailler dans la 3d ne m’enchante pas et en même temps je ne pense pas pouvoir vivre uniquement du dessin.
Je trouve finalement un boulot dans le dessin animé 3D à Angoulême où je travaille par intermittence jusqu’en 2008. À ce moment-là, je suis un peu démoralisée et je ne dessine plus du tout. Il faut dire que les “tueurs” de ma classe m’ont filé tellement de complexes que j’ai presque fini par être dégoûtée du dessin.
2008 : je m’inscris sur Facebook et Myspace (qu’est-ce qu’elle est devenue d’ailleurs cette plateforme ? ^^), et j’y découvre plein d’illustrateurs qui me redonnent le goût et la motivation de dessiner à nouveau : Adolie Day, Lostfish, Moon, Lilidoll, Pénélope Bagieu, Audrey Kawasaki, etc. Je re-commence donc à dessiner pour moi mais uniquement en très grand format, sûrement dans l’idée de faire une expo plus tard.
Je lance alors mon premier blog car à part Facebook, c’est le seul moyen de partager son travail. Je réalise mes premiers tableaux et illustrations sous le pseudo Luciole-art et Miss Firefly (mais pourquoi ce pseudo ???) juste pour le plaisir.
Je me mets à partager mes dessins sur le forum Café Salé pour demander des avis sur mes créations. Je poste aussi sur des sites comme Amkashop dans le but de me faire un peu remarquer. À force de persévérance, deux illustrations sont sélectionnées et proposées à la vente sur Amkashop et j’obtiens une première parution dans l’artbook n°2 de Café Salé.
C’est l’époque où je me cherche, je touche à tout, illustration enfantine, collage sphotos, dessins semi-réaliste puis réalistes, peinture, aquarelle, feutre, je teste un peu tout ! Il n’y a absolument aucune homogénéité dans mon travail mais peu importe, je m’amuse et je retrouve enfin du plaisir à dessiner !!!
Je décide de faire une première expo dans un restaurant à Angoulême qui s’avère être un véritable gouffre financier. Je peine à trouver les bons imprimeurs pour mes affiches et mes toiles (à l’époque c’était beaucoup plus compliqué à trouver que maintenant), et je ne vend casiment rien ! Aujourd’hui d’ailleurs, il y a encore ces tableaux chez mon frère et mes parents !
2009 : terminé la 3D ! Avec mon copain de l’époque, on décide de partir plusieurs mois en Australie, et de mon côté, je prends enfin la décision de devenir illustratrice. Et justement, en arrivant en Australie je suis subjuguée par l’abondance d’illustration. Ici le dessin est partout, et les australiens sont hyper créatifs.
Dans une librairie, je tombe sur le Vogue illustré par David Downton à l’occasion des 50 ans du magazine, et c’est la révélation ! Je comprends que c’est ce genre d’illustration que j’ai envie de faire, et l’idée d’illustrer pour des magazines féminins commence à germer dans ma tête.
Je fais même un CV en forme de magazine pour sortir du lot (ce n’est que plus tard que je réaliserai qu’un CV est inutile pour travailler dans l’illustration ^^). Je profite de cette période de chômage pour chercher mon style, flâner dans des librairies (notamment la géniale enseigne japonaise Kinokuniya), j’achète des bouquins sur l’illustration, je découvre de nouveaux illustrateurs qui m’inspirent : Cécilia Carlstedt, James Jean, Sarah Hingle… Et je continue à diffuser mon travail sur le net notamment sur Behance lancé depuis peu.
Au même moment, dans une auberge de jeunesse de Sydney, moi copain et moi rencontrons un groupe de français avec qui on sympathise, dont un développeur qui m’aide à faire mon premier site web html à partir de zéro et créer ma première adresse mail pro. Il faut savoir qu’à ce moment-là, il n’y avait pas autant de templates pour créer son site que maintenant.
En revanche, les smartphones n’en étaient qu’à leurs balbutiements, et donc le format “responsive” n’existait pas encore. Les sites web étaient donc beaucoup moins complexes à créer que maintenant.
Pour ce premier site, j’ai passé beaucoup de temps car je voulais qu’il est un look vraiment pro, clean et fonctionnel. D’ailleurs, depuis sa création, mon site web a toujours été une priorité pour moi car j’ai vite compris qu’un site web pouvait facilement faire ou défaire une réputation suivant l’énergie et les efforts qu’on y met.
Je m’inspire notamment de ce que font les marques et je fais en sorte que tous mes canaux de communication soient cohérents en terme d’image : même avatar, même tagline, même charte graphique afin de faciliter la mémorisation de mon travail. J’ai toujours été un peu obsédée par “l’image de marque” car je pense qu’une identité forte renforce la crédibilité et permet de montrer à sa clientèle que l’on prend son business au sérieux.
Depuis la création de mon site, j’ai dû sortir au moins 5 versions dont la dernière lancée le 1er avril de cette année. Pour chaque version, je fais beaucoup de recherches pour voir ce qui se fait en terme de graphisme, d’ergonomie, de navigation, etc. D’ailleurs, la version actuelle est loin d’être parfaite à mes yeux, et j’ai une to-do liste longue comme le bras d’améliorations à lui apporter mais c’est un autre sujet ! ^^
Installée depuis quelques mois à Sydney avec mon copain, je dessine énormément dans le but de constituer mon premier portfolio. Maintenant que je sais ce que j’ai envie de faire, je me pose beaucoup moins de questions et j’arrive à me constituer un portfolio d’une quinzaine d’illustrations qui correspondent à la clientèle que j’ai envie d’atteindre.
2 | Le grand saut
2010 : À notre retour en France, nous nous installons comme prévu sur Paris pour tenter de mettre toutes les chances de notre côté pour notre reconversion. Moi dans l’illustration et lui dans le motion design. Je déclare mon activité au impôts et je m’inscris à la MDA, mais pour le reste, c’est l’inconnu total. Heureusement qu’il me reste quelques mois de chômage devant moi.
Étant un peu inconsciente de nature, je n’ai même pas de plan B, mais je suis plus déterminée que jamais à faire de mon rêve une réalité. Je suis toujours à la recherche d’informations sur la façon de prospecter, de trouver des clients, etc.
Un jour, je tombe sur une interview de Pénélope Bagieu qui explique qu’elle a commencé sa carrière en allant frapper aux portes des agences de com’. Alors je commence à faire pareil. Je me constitue un portfolio papier (avec des impressions Fine-art qui me coûtent très cher), et je commence à aller frapper d’agence en agences la peur au ventre.
Les 3/4 du temps les retours sont négatifs mais encourageants. J’envoie aussi des mails et je commence à décrocher quelques maigres contrats pour des flyers et des magazines. À côté de ça, je fais aussi des portraits pour des particuliers. Au fond de moi, je commence à désespérer du manque de projets intéressants, mais j’essaie de rester positive.
Le plus dur je crois à ce moment-là, c’est le regard des gens qui me posent des questions sur mon travail. J’ose à peine dire que je suis illustratrice car j’ai l’impression de mentir. Peut-on vraiment se prétendre illustratrice quand on ne parvient pas à en vivre décemment ?
En plus de cela, tout le monde y va de son petit conseil même ce qui n’y connaissent rien à l’illustration : tu devrais faire un blog de bd comme Pénélope Bagieu, tu devrais faire ci, tu devrais faire ça…
Je découvre d’autres illustrateurs qui m’inspirent et me motivent encore plus : Birdy & me, Tina Berning et mon style devient plus “mode”. Pendant ce temps-là, la communauté de mon blog grandi et je cherche constamment des occasions de faire connaitre mon travail : réseautage sur les réseaux sociaux, participations à des expositions etc.
À force de poster sur Facebook et Café Salé et de recevoir des retours qui me permettent de m’améliorer, je peaufine mon style. Et un jour, c’est ma participation à l’exposition hommage de Skydoll pour les 10 ans de la BD et surtout tous les avis positifs sur ma proposition qui me décident à adopter ce style que j’ai gardé longtemps : pointillisme + cheveux au trait.
Peu à peu, je commence à me familiariser avec mon processus de travail et mon travail devient un plus “abouti” et homogène. Je commence à exposer au gré des occasions en France et aux États-Unis. Et après plusieurs mois à prospecter je trouve mon premier agent ! Hourra ! Malheureusement, au bout de quelques mois, désillusion, je dois me rendre à l’évidence, celui-ci ne m’a toujours pas trouvé de contrat…
2011 : j’intègre l’équipe d’illustrateurs de La Marelle (une marque de papeterie qui n’existe plus aujourd’hui), et je rejoins notamment Adolie Day, Marie Desbons, Chloé Rémiat, Natalie Lété, etc.
Cette année là, j’intègre également l’agence d’illustrateurs Colagene, et dans la foulée je fais mes premiers “gros” projets dont une campagne de pub pour du vin dont le budget contient 4 zéros ! Yououh ! Enfin !
À partir de là, j’enchaîne les illustrations pour Target, les magazines féminins, Nina Ricci, Rochas, Ladurée, Les Galeries Lafayette, etc. Mais tout n’est pas rose ! Je travaille sans compter mes heures car les deadlines sont souvent très serrées notamment dans la publicité.
Et les désillusions sont fréquentes : les super projets qui n’aboutissent pas, les changements d’avis, les clients impossibles aussi parfois… Mais je réalise la chance que j’ai d’avoir enfin touché au but et réalisé mon rêve.
2011- 2015 : En parallèle des commandes que me rapporte mon agent, je ne me repose pas sur mes lauriers et continue toujours la promotion de mon travail notamment sur Instagram, la nouvelle plate-forme à la mode ce qui me permet de faire de jolies rencontres et de toucher un public différent. Je continue à réaliser des collections pour La Marelle et Clairefontaine, et quelques commandes pour des particuliers.
2016 : je suis contactée par l’équipe de Stella Mc Cartney pour assister à un défilé au Palais Garnier et rencontrer les modèles pour créer du contenu pour les réseaux sociaux de la marque. Je suis littéralement aux anges !!! La même année, je passe mon site web sur WordPress et je commencer à bloguer de façon plus assidue…
2017 : je suis contactée par Kate Spade pour réaliser des illustrations en live lors d’un événement dans leur nouvelle boutique parisienne.
2018 : je réalise une collection d’affiches en collaboration avec Desenio
2021 : Je continue les projets d’illustration et je décroche un contrat avec Dior #lifegoal
2022 : je mets les illustrations de commande en “pause” pour me consacrer davantage à ma boutique en ligne et mon activité d’éducatrice
Et voilà vous savez tout sur mes premiers pas dans l’illustration, mes galères et mes périodes de doute. Pour conclure, je dirais que j’ai mis un peu de temps à déterminer mon marché, mais ensuite, tout a été beaucoup plus fluide. Je suis parvenu à mieux canaliser ma créativité, définir une identité mon travail est devenu plus “mature” et finalement les choses se sont enchaînées assez rapidement à partir de de moment-là.
Est-ce que vous vous retrouvez dans certains éléments de mon histoire ? Et vous, où est-ce que en êtes actuellement ? Si vous êtes déjà lancé depuis un moment, qu’est-ce qui vous a aidé au départ ? Ou si vous avez l’impression d’être coincé.e, qu’est-ce qui vous freine le plus aujourd’hui ? Partagez votre expérience en commentaire, posez vos questions et répondez à celles des autres. Encouragez-vous et soutenez-vous c’est important ! 🙂
The Comments
sandrine
Merci pour ton témoignage,
Ca fait pas mal de points communs: originaire de Noirmoutier, je suis en freelance depuis l’an dernier, je travaille dans ce métier depuis 2002.
Je me retrouve beaucoup dans ces périodes de doutes, et cette volonté intarissable…qui se traduit en courage!
Je ne trouve pas que tu sois naïve, tu es juste optimiste, ce qui veut dire que tu as envie naturellement de mettre le pessimisme de côté…et finalement c’est comme ça qu’on avance!
Sandrine
elodie_2019
> sandrineAh oui Noirmoutier je connais j’ai de la famille là-bas ! 🙂 Oui mettre le pessismisme de côté et croire en ses rêves ! Toujours 🙂 Merci pour ton petit mot Sandrine !
Sifhel
C’est une très belle aventure ! Ta persévérance est enfin récompensée. Et je pense que ça nous encourage un peu à ne rien lâcher. J’ai l’impression que ça fait 5 ans que je cherche ce que je veux réaliser en dessin xD. J’adore tellement de techniques et tellement de sujets différents.
J’ai eu du mal à avoir des retours café salé à la grande époque du coup j’ai complètement lâché ce site et j’avais préféré le grand Deviantart. Aujourd’hui à part instagram je ne sais pas trop quelle plateforme vaut vraiment le coup. Je trouve Artstation un peu austère…
Je me retrouve un peu dans ton histoire avec l’illustration jeunesse. J’avais essayé avec le site autour du livre jeunesse mais au final je n’ai pas assez eu de passion pour cet univers et surtout j’avais un mauvais niveau.Donc je n’ai pas terminé ce que j’avais commencé dessus. Ca va que ce n’était que de l’entraînement !
Myriam Gabrielle
Merci pour ce billet de blog ! Je débute (sur le tard, je suis une “late-bloomer” comme disent joliment les Anglais) et pouvoir s’imaginer un peu la route qui reste à faire est un exercice très inspirant !
elodie_2019
> Myriam GabrielleAh super c’était le but de cet article ! Contente qu’il te plaise 🙂
Sophie
Merci Elodie pour ce beau et passionnant témoignage, plein d’humilité, de générosité et de bonnes ondes transmises!
elodie_2019
> SophieOh merci beaucoup !!! 🙂
Clémence
Bonjour Elodie, merci pour tes articles et ta sincérité, tu es d’une aide précieuse pour les personnes qui veulent se lancer dans l’illustration (ou qui sont déjà dans le grand bain!).
Comment as-tu su que tu avais trouvé ton style en illustration ? En lisant ton histoire, je me reconnais dans la période où tu as une production hétéroclite en utilisant des techniques différentes… Penses-tu qu’il faille trouver un style unique, une cohérence dans son style pour se lancer ? Comment faire pour homogénéiser son travail ? Dessiner, dessiner et encore dessiner mais il y a plusieurs techniques que j’aime beaucoup et je n’arrive pas vraiment à choisir. Belle journée à toi, à bientôt
elodie_2019
> ClémenceBonjour, justement, je l’explique dans l’article : “À force de poster sur Facebook et Café Salé et de recevoir des retours qui me permettent de m’améliorer, je peaufine mon style. Et un jour, c’est ma participation à l’exposition hommage de Skydoll pour les 10 ans de la BD et surtout tous les avis positifs sur ma proposition qui me décident à adopter ce style que j’ai gardé longtemps : pointillisme + cheveux au trait.”
Oui je pense que c’est primordial d’homogénéiser son travail et d’avoir un portfolio cohérent avec le type de client que l’on convoitise car en voulant plaire à tout le monde, on fini souvent par ne plaire à personne. Ensuite je dirai qu’il faut choisir en fonction de ce que tu aimes le plus visuellement, le processus de travail qui te plaît le plus, et les retours des personnes extérieures sur ton travail 🙂
Zoulette and Co
Pour ma part, c’est en honorant ma passion, en la nourrissant depuis l’enfance que je suis restée créative malgré les tempêtes.
Avec le temps, je me rends compte que la perfectibilité de mes desseins (jeu de mots hihi! désolé, c’était celui le plus à propos quant à mon explication) sont de puissants moteurs. C’est en approchant ma peur du “vide” que je l’apprivoise et que je réussi de belles envolée… 😉
Courage à tou(te)s celles et ceux qui se lancent pour déployer leurs ailes!
elodie_2019
> Zoulette and CoMerci pour ton témoignage 🙂
Mélanie
Bonjour et merci pour ton témoignage !
Il permet de voir que même si les débuts sont durs, c’est quand même possible !
À vrai dire je me suis lancé qu’il n’y a que très peu de temps en tant qu’artiste-auteur pour mes illustrations à l’aquarelle et c’est vrai que toucher une clientèle est assez compliqué.
Je me suis concentrée sur mon compte Instagram pour faire connaître mon travail et je fais quelques démarches dans des boutiques qui mettent à l’honneur des créateurs pour mettre en dépôt quelques illustrations. C’est tout nouveau alors je ne peux pas vraiment avoir de recul mais s’il y a des avis ou des conseils sur des démarches plus particulières à faire, je serai à l’écoute.
En tout cas merci à toi Ëlodie de nous partager ses moments de ta vie !